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Lutte concrète contre le harcèlement scolaire.

Dernière mise à jour : 2 févr. 2019


Illustration :"Marion 13 ans pour toujours" de Bourlem Guerdjou


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Comme beaucoup d’entre vous et comme sous-entendu dans mon article sur la rosière, c’est quelque chose que je connais, que j’ai vécu et qui m’a marqué. Je ne vais pas revenir sur tout ce qu’on m’a fait, ça ne sert à rien de parler sans cesse des horreurs que nous sommes nombreux à vivre, si on ne parle pas de ce qui fait qu’on s’en sort. Ni de comment s’en sortir d’ailleurs.

Certains diront « en parler » à des adultes responsables. Ceux-là : soit ils ne sont que les témoins silencieux qui n’ont jamais été harcelés, soit ils ont la chance d’être issus d’un établissement où l’encadrement adulte était fait par des personnes qui prenaient vraiment les enfants et adolescents au sérieux. C’est malheureusement beaucoup plus rare que ce que les spots de sensibilisation du gouvernement peuvent laisser penser.


Pour ma part j’ai eu droit à du « tu n’as cas…. » ; « Mais ce sont des gamins… » Ou mieux « c’est parce que tu es fainéante… » (Ça c’est mes parents qui pensaient sans doute que sortir ce genre de réponse aller me motiver pour faire remonter ma moyenne en math, résultat j'ai toujours la phobie des chiffres). J’ai aussi eu le droit au classique « c’est toi qui les provoques aussi…. » (Je n’étais pas consciente des problèmes que posaient le slut-shamming, ni le shamming tout cours à l’époque. J’étais tellement mal dans ma peau que j’étais tout le temps en pantalon, manche longue avec un grand Keffieh pour qu'on ne voit pas mes formes). En vieillissant, je finis par me demander si l’écriteau « attention ne provoque pas ! » qu’on nous sort à toutes les sauces, ce n’est pas juste un truc bidon pour personne se prétendant garant d’une sécurité quelconque, mais qui à la flemme de remplir ses fonctions. Bref vous voyez quand on parle aux « adultes responsables », ce n’est pas tout le temps efficace.


J’ai pourtant fini par avoir quelques astuces pour limiter les dégâts :

- Je me réfugiais au CDI quand ses heures d’ouverture coïncidaient avec les temps de pause de ma classe (J’étais dans un petit établissement, il paraît que pour les plus grands il y a une plus grande amplitude horaire).

- Je n’allais pas aux toilettes pendant les récrées, je demandais aux profs pendant les heures de cours à des moments où ils n’avaient aucune raison de s’énerver et donc de refuser. (S’il y a des profs qui me lisent, réfléchissaient avant de refuser une sortie pipi à un élève).

- Si un prof oubliait de fermer une classe, je m’y réfugiais pour lire. (Mais attention à ne pas se faire prendre, ni par les surveillants qui sont censés être là pour ta sécurité alors qu’en fait ils "ne veulent rien savoir ", ni par les bourreaux).

Je n’ai jamais trouvé de parade aux heures de repas ni au à l’épreuve des vestiaires qui sont les pires heures dans la scolarité d’un élève harcelé. D’ailleurs si jamais des personnes de l’éducation nationale passent sur mon humble blog, j’aimerais qu’ils réfléchissent à l’intérêt réel des heures de sports obligatoires en milieu scolaire. Parce que je comprends le principe théorique pour lutter contre les problèmes de surpoids. Mais en pratiques ça entasse plus qu’autre chose les élèves en question, car en plus de l’exposition totale aux harceleurs, les professeurs de sport sont très loin d’être encourageants. Se sont des élèves qui sont plus souvent mis sur le côté aussi bien par leurs camarades que par le professeur, ce qui rend les quatre ou trois heures de sport hebdomadaire aussi inutile que destructrices.


J’ai tout de même réussi à trouver des cordes pour garder la tête hors de l’eau et ne pas me noyer.


La terre du milieu et Poudlard furent mes deux refuges de poche.


* Tout d’abord l’écriture, j’écris à peu près depuis mes 13 ans et j’ai créé à 15 ans un skyblog pour y poster des poèmes (oui, un skyblog même pas honte ! De toute façon à l’époque il n’y avait que ça de non payant). Je me suis rendu compte que je n’étais pas si seule. Certaines personnes de mon établissement ont posté des encouragements anonymes, je n’ai jamais su qui elles étaient, mais je les en remercie.

* La lecture m’a aussi permis beaucoup d’évasion : J'ai voyagé grâce à Jules Vernes, imaginé l'avenir grâce à Renée Barjavel ou Maxime Chattam. J'ai connu l'amitié grâce à Harry Potter (qui m'a aussi appris le travail de deuil) et assumé mon amour de la lecture grâce à Hermione, j'ai eu des notions de courage grâce à Frodon Sacquet et de résistance par l'intrépide Léa Delmas.

* À 14 ans alors que je devenais une adolescente gênante pour mes parents, j’ai pu participer à mes premiers chantiers de jeunes (faire de la maçonnerie et des visites commentées pour faire remonter la confiance en soi c’est vraiment pas mal). Les amitiés que j’ai noué sont toujours d’actualité. À noter qu’en plus de la confiance en moi, l’entrée dans cette association fut comme une bouffée d’air que je prenais pendant les vacances et qui me permit de rester la tête hors de l’eau dans l’ambiance étouffante du milieu scolaire.

Bien sûr chaque personne est différente, ce qui marche pour moi ne marchera pas forcément pour autrui… (et je déconseille aux parents de retirer vos enfants d’un milieu qui les épanouit, même si vous vous disputez avec son responsable… Gardez vos disputes d’adultes pour vous). J'en profite pour dire que si j'écris à la première personne, c'est parce que mes idées sont liées à mon expérience.... mais que tout élève harcelé peut avoir des "trucs" pour s'échapper.


Bien que je m’en sois sortie, que ça fasse parti de mon passé. Cette période est ancrée en moi et fait intégralement partit de ma personnalité.

- Dans le sens où si je peux être très sociable, j’ai aussi un immense besoin de solitude qui n’est pas forcément compris.

-Je n’ai aucune confiance à tout ce qui est hiérarchie et me méfie des personnes qui prétendent s’occuper de moi.

- J’ai une confiance très modérée envers ma famille et si je la fréquente encore j’ai renoncé à compter sur elle. (Je pense que ça se sent dans ma nouvelle).

- J’ai du mal à donner de mes nouvelles à mes amis.es, j’ai du mal à avoir conscience de leurs amitiés.

- Je n’ai pas une grande confiance en moi, mais je finis toujours par oser me lancer.

- Je pense d’ailleurs que le fait de savoir oser vient de là.

- J’ai une colère qui nourrit mon imagination (pour une autrice, c’est plutôt pas mal).

- Mon côté solitaire me permet une liberté de mouvement que d’autres n'ont pas. Cette liberté n'est pas sans sacrifice, je suis incapable d'être "en couple" sans finir par me sentir enfermée (même lorsqu'il s'agit d'un couple ouvert). Je ne supporte pas avoir l'impression de servir de nin-nin ou de maman de substitution, de devoir avoir des manières cucu la praline sous peine de "blesser" l'autre moitié. Je finis automatiquement par m'enfuir.

- Une capacité de savoir me détacher des mouvements de groupes quand je sens que ça « part en vrille » que je n’aurais peut-être pas eu non plus (à moins que mon harcèlement ait commencé à cause de cette capacité… qui sait ?).

- La dernière chose qui peut paraître superficielle au premier abord, cependant je trouve que c’est assez révélateur des paradoxes de notre monde : Les humiliations que j’ai vécu, les insultes qui m’ont détruite et la reconstruction que j’ai dû faire pour "récupérer" le contrôle de mon être, m’ont offert une capacité d’assumer mon appétit sexuel que je n’aurais certainement jamais osé formuler même à voix basse si on m’avait toujours chouchouté comme une pierre précieuse. Avec en questionnement « Pourquoi je me sens plus respectée et mieux considérée par mes amants, que par les gens qui auraient dû me protéger quand j’étais plus jeune ? »qui va certainement en emmerder certains, choquer d’autres et gêner ceux qui me connaissent…. J’achève mon texte.


Édit : Je ne suis pas habituée à demander des commentaires, je vais faire une exception : Si parmi les lecteurs, il y a d'autres personnes harcelées qui ont aussi des astuces à partager, ce serait sympa de les mettre pour souffler quelques idées aux plus jeunes.

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